situation du quotidien régional
l'union
M.
le président : La parole est
à M. René-Paul Savary, auteur de la question n° 70,
transmise à Mme la ministre de la culture et de la communication.
M.
René-Paul Savary : Madame le
ministre, je me permets de vous interpeller, au nom de l’ensemble de mes
collègues représentant la Marne, les Ardennes ou l’Aisne
– mon collègue Antoine Lefèvre, maire de Laon, est
d’ailleurs présent ce matin pour appuyer ma
démarche –, sur la situation de
L’Union, grand
quotidien régional issu de la Résistance et confronté depuis
plusieurs mois à des difficultés. Le climat social est
particulièrement compliqué au sein du groupe auquel il appartient,
entre projets de reprise et éventuel dépôt de bilan.
Des menaces pèsent sur l’avenir du titre, et
même sur l’intégralité du pôle
Champagne-Ardenne-Picardie, à savoir L’Union, CAP
Régies, L’Aisne Nouvelle, L’Est-Éclair.
Sur le plan économique, la disparition de ces publications serait
dramatique pour l’ensemble des régions concernées, avec plus de
640 emplois en jeu.
Au départ, le groupe Rossel s’était montré
intéressé par la reprise et avait mis comme condition indispensable
à sa participation au projet de rapprochement avec le Groupe Hersant
Média un accord social préalable. Or, la FILPAC-CGT – la
Fédération des travailleurs des industries du livre, du papier et de
la communication-CGT – a catégoriquement rejeté cet
accord. Malgré le courage de l’ensemble des salariés, lesquels
ont soutenu ce projet de reprise et bravé parfois les pressions
exercées, dans un climat social, vous vous en doutez, fortement
dégradé, le rapprochement n’a pu se réaliser et le groupe
Rossel, d’après ce que l’on peut en savoir, s’est vu
dans l’obligation de retirer son dossier.
Dès lors, se pose la question du plan de sauvegarde que
l’on pourrait proposer à la direction du pôle
Champagne-Ardenne-Picardie pour conserver le maximum d’emplois dans des
conditions acceptables, sachant que les questions de la liberté de la
presse et du droit à l’information se posent également. En
effet, la presse est partie prenante dans notre vie et c’est un facteur
majeur du dynamisme local. Or il n’existe dans ces secteurs qu’un
seul quotidien. Pour ces raisons, l’absence de ce dernier sur le
territoire champardennais ferait, bien sûr, cruellement défaut.
Madame le ministre, quel est l’état des discussions
avec des repreneurs éventuels ? Quelles actions le Gouvernement
compte-t-il entreprendre afin de débloquer cette triste situation ?
Mme
Aurélie Filippetti,
ministre de
la culture et de la communication : Monsieur le sénateur, vous
l’avez dit, le Gouvernement suit depuis plusieurs mois la situation des
journaux du pôle Champagne-Ardenne-Picardie, et plus
généralement du Groupe Hersant Média, ou GHM.
Nul n’ignore que GHM connaît un endettement depuis
plusieurs années. Cette situation oriente évidemment les choix
stratégiques du groupe en matière de restructurations. J’en
veux pour preuve l’accord passé en 2011 sous l’égide du
CIRI, le Comité interministériel de restructuration industrielle,
entre GHM, le groupe Rossel et le pool bancaire. Cet accord
prévoyait des cessions d’actifs, notamment dans les pôles
calédonien et polynésien, en échange d’un abandon, par les
banques, de 50 millions d’euros de dettes.
Autrement dit, la restructuration des journaux du Groupe
Hersant Média était clairement l’une des conditions de mise en
œuvre de l’accord bancaire, ainsi que du rapprochement avec le
groupe Rossel.
Compte tenu de la cession du pôle normand et du pôle
Polynésie, GHM dispose aujourd'hui d’une trésorerie suffisante
pour cet automne. Il doit donc maintenant s’attacher à définir
un projet de groupe pour les deux autres groupes de titres qui lui
appartiennent : le pôle Champagne-Ardenne-Picardie, que vous
évoquez, et le pôle PACA.
Vous avez mentionné l’intérêt du groupe
Rossel pour les journaux de GHM. Ce rapprochement pourrait donner naissance au
troisième groupe de presse régionale en France.
Toutefois, malgré ces négociations et l’apport
prévu de 20 millions d’euros, les groupes Hersant et Rossel ont
pour le moment suspendu les négociations pour le rachat des journaux du
pôle Champagne-Ardenne-Picardie.
Un nouvel administrateur judiciaire de GHM a été
nommé au début du mois d’août par le tribunal de commerce
de Paris. Dans le cadre d’une période de conciliation qui ne pourra
pas excéder cinq mois, cet administrateur est chargé d’aider
à l’émergence d’un accord avec les banques
créancières du groupe, accord qui devra intervenir avant la fin de
l’année 2012.
Monsieur le sénateur, la perte de ces journaux serait bien
évidemment dramatique pour les régions Champagne-Ardenne et Picardie,
tant sur le plan social, avec 640 salariés concernés,
qu’en matière de liberté de la presse, d’accès
à l’information et de diversité de l’offre.
Pour ma part, je n’exclus toutefois pas que le groupe
Rossel, dont les titres sont, sur le plan géographique, vraiment
complémentaires du pôle CAP, puisse de nouveau
s’intéresser à cette reprise. De nombreux salariés du
groupe semblent favorables à cette option.
Une délégation d’organisations syndicales a
été reçue à l’Élysée le 17 septembre
dernier. Il a été convenu qu’un point rapide serait
effectué sur ce dossier avec l’ensemble des ministères
concernés, à savoir les ministères du travail, de la culture,
des finances et du redressement productif.
Bien évidemment, le ministère du redressement
productif comme celui de la culture et de la communication sont totalement
mobilisés, et l’ensemble des dispositifs de soutien est prêt
à être mis en œuvre. Nous sommes des partenaires actifs dans la
décision que prendront les pouvoirs publics sur ce dossier. Nous
continuons et nous continuerons dans les prochaines semaines à
échanger de la façon la plus directe possible avec les dirigeants des
groupes de presse concernés, pour aboutir à une solution.
J’entends que c’est au plus haut niveau de
l’État que l’affaire est remontée. Nous sommes
particulièrement attentifs à la structuration de l’information,
laquelle est essentielle, notamment pour le développement de toutes ces
régions.
Bien entendu, nous sommes aussi particulièrement attentifs
à la suite qui sera donnée à la situation des salariés.
Nous souhaitons vraiment que chacun y mette du sien de
façon à trouver la solution la plus favorable et à limiter la
casse au maximum. Les inquiétudes sont toujours présentes mais on
peut envisager qu’une solution pourrait être trouvée
d’ici à la fin de l’année. C’est en tout cas le
message que je transmettrai à la suite de votre intervention, madame le
ministre.